• Chapeau les retraites !

    Un pays qui s’étiole avec une croissance qui végète autour de 1,7% depuis des lustres, un chômage important et une espérance de vie qui met les actifs en minorité dans le pays (près de 70 millions d’habitants mais moins de 30 millions au boulot). 

     

    42 systèmes de retraite et une perspective de faillite si rien n’est fait pour les maintenir durablement à flot. 

     

    Une surenchère d’avantages dont bénéficient certains d’entre eux, surtout grâce à l’impôt. 

    Un gouvernement qui dit qu’il va touiller tout ça et en faire sortir un lapin blanc.

     

    Pour résoudre cette équation, la démarche du gouvernement est courageuse, voire audacieuse mais portera-t-elle ses fruits ?

     

    Je n’en sais rien. Alors je dis ici ce que je crois savoir.

     

     

    Prologue 

    Je croyais être à la retraite mais des gens mal intentionnés me remettent au turbin pour que je leur dise ce qui se cache derrière cette réforme des retraites qui pourrait être d’actualité.

    Alors je vais essayer de donner un bref aperçu de ce que je crois.

    Si mes simplifications et mes approximations risquent de vous déranger ne lisez pas plus loin et penchez-vous plutôt sur le rapport de Delevoye qui doit être disponible quelque part. Ici vous ne trouverez pas une thèse de doctorant mais seulement ce que je crois comprendre.

     

    Le démarrage n’a pas été facile ! D’abord je suis allé au supermarché du coin pour acheter quelques plume Sergent Major et une bouteille d’encre Waterman enfin de coucher dans mon cahier toutes ce que je pense sur cette question. Comme je suis revenu bredouille force est de reconnaître que le monde a changé depuis que j’ai quitté l’école, alors comme je dois écrire je m’adapte.

     

     

    Maintenant j’aborde les retraites … 

     

    Dans le poste on cite 42 régimes différents et je n’en connais pas le quart.

    Grosso-modo parmi ces 42 régimes il y a :

    le régime général d’assurance vieillesse qui concerne la plupart des salariés du privé soit plus de 70% des futurs retraités

    La retraite des fonctionnaires qui concerne presque 20% des futurs retraités

    Une trentaine de régimes autonomes des professions libérales et assimilés  (avocats, professionnels de la santé, commerçants, travailleurs indépendants, agriculteurs, etc.) soit près de 5% des futurs retraités

    Une dizaine de régimes spéciaux créés par l’Etat au titre de ce qu’il convenait alors d’appeler le service public

                  (SNCF, EDF, RATP, les PTT devenus la Poste et France-Télécom-Orange, Air France, l’Opéra de Paris, etc.)

    encore quelques 5% des futurs retraités.

     

    Ces régimes se distinguent les uns des autres de plusieurs façons, notamment :

    Par les montants des cotisations

    Par la durée de cotisation correspondant à l’âge de départ à la retraite

    Par le calcul du montant des retraites qui seront versées

     

     

    Je vais décrire maintenant les différences qu’il me parait important de souligner.

     

    Le régime général 

     

    Les actifs

    Les entreprise et les salariés cotisent obligatoirement au régime d’assurance de la sécurité sociale et aux régimes complémentaires appelés ARCOO-AGIRC.

    Les cotisations à ces régimes sont progressives. Une cotisation de 10,05% est prélevée sur les salaires (dont 6,90% pour la sécu) jusqu’à 3400 € par mois et l’employeur cotise 13,22% sur le même montant.

    Au-delà de 3400 € par mois la sécurité sociale ne tient pas compte des salaires (elle ne prélève pas de cotisations et elle ne versera donc pas de retraite), le salarié cotise seulement aux régimes complémentaires soit 8,62% et l’employeur ajoute 12,95%.

     

    Les retraites de la sécurité sociale

    A 62 ans le salarié peut toucher une retraite versée par la sécu qui est calculée sur la moyenne des 25 meilleures années de cotisation.

    Cette retraite est égale à 50% de cette moyenne. Le salarié peut donc calculer lui-même la retraite qui lui revient.

     

    Les retraites des régimes complémentaires

    Les cotisations aux régimes complémentaires lui assurent également une retraite qui n’est pas aussi simple à calculer. Il s’agit d’un système par point qui dépend des ressources (les cotisations) et de la masse globale à verser (les retraites).

    Pour équilibrer ce système les organismes de retraite établissent le montant des cotisations qu’ils doivent percevoir, (le montant actuel est cité plus haut) et chaque salarié cotisant accumule des points de retraite à hauteur de ses cotisations.

    Pour verser la retraite complémentaire aux ayant-droits, les organismes calculent la valeur du point et ajustent ainsi leurs prestations à la démographie des participants (salariés-cotisants et retraités-bénéficiaires).

    Le système sera toujours équilibré mais la démographie défavorable annoncée (peu de cotisants, trop de retraités) entraînerait mécaniquement la chute du montant des retraites servies.

     

     Exemple :

    Sans période de chômage les 25 meilleures années sont généralement les 25 dernières années d’activité.

    Ainsi un travailleur ayant eu sur un revenu de 2000 € mensuel  au début de ces 25 ans et une progression annuelle régulière de 3,75%, son revenu atteindra 5 000 € en fin de carrière.

    S'agissant de la sécu, le revenu pris en compte est plafonné et seulement 3 400€ sont retenus pour le calcul dans les 10 dernières années pour lesquelles le revenu mensuel dépasse cette borne. De ce fait la moyenne des revenus pour les s 25 meilleures années sera seulement de 2 950€ ce qui entraînera une retraite versée par la sécurité sociale de la moitié de ce montant soit 1 475€ mensuel.

    Cependant, le salarié ayant aussi cotisé aux régimes complémentaires, ils lui verseront une retraite calculée sur l'ensemble de ses revenus..

    Le calcul n'est pas aisé car il dépend des points acquis pendant toute la carrière (pas seulement les 25 meilleures années) et donc selon la valeur du point à chaque étape. Le résultat selon les carrières se situera donc dans la fourchette 1 400 € à 2 350 € mensuel.

    Globalement,le salarié recevra donc entre 2 875€ et 3 825€ mensuel.

    La retraite ainsi versée est fixe mais les cotisations sont aléatoires aussi, quand le nombre de cotisants est insuffisants, ce qui est déjà le cas, le système est déficitaire et l’Etat doit puiser dans ses ressources propres pour combler le déficit. Pour ce faire il dispose de deux sources qu’il estime inépuisables : l’impôt et la dette de la France.

     

    Le régime de retraite des fonctionnaires 

     

    Les actifs

    Le régime est plus simple que celui du privé car il n’y a pas de plafond entraînant le besoin d’un régime complémentaire (il existe bien un régime complémentaire facultatif appelé Préfond mais comme les autres assurances-vie avec sortie en viager il reste hors système).

    Ce qui complique c’est que les retraités futurs –même avant la réforme annoncée-- ne bénéficieront pas des mêmes avantages que les retraités actuels.

    Le taux de cotisation des fonctionnaires est de 10,83% sur le montant du salaire. Pour les fonctionnaires d’Etat l’employeur cotise 74,28% de plus et pour les collectivités territoriales c’est 30,65%.

     

    Les retraites des fonctionnaires

    Les cotisations très importantes de l’employeur permettent de servir des retraites tout aussi importantes.

    Ainsi la retraite versée aux fonctionnaires n’est pas calculée sur la moyenne des 25 meilleures années mais sur le salaire du dernier semestre d’activité. Elle s’est élevée à 80% de ce salaire pour les retraités actuels mais on l’a ramenée à 75% récemment.

     

    Exemple :

    Ainsi un travailleur ayant eu sur un revenu de 2000 € mensuel il y a  25 ans et une progression annuelle régulière de 3,75% pour atteindre 5000 € en fin de carrière aura une retraite de 75% de ce dernier montant soit 3 750 € mensuel (c'était 4 000€ précédemment).

     

    La retraite versée est fixe mais les cotisations sont aléatoires aussi, quand le nombre de cotisants est insuffisants l’Etat doit ajuster son taux de contribution pour combler rééquilibrer le système. Pour ce faire il dispose de deux sources qu’il estime inépuisables : l’impôt et la dette de la France.

     

     

    Les régimes autonomes 

     

    Il s’agit de corporations qui ont constitué chacune leur propre système avec  ses règles (taux de cotisation, durée de cotisation, méthode de calcul des retraites). Leur gestion n’appelle pas de commentaire, elles ajustent leurs paramètres pour être équilibrées et on dit que certaines sont même excédentaires.

    Certaines courent cependant le risque de voir leur population d’actifs s’étioler, voire disparaître suite à des évolutions de leur environnement et comme elles sont indépendantes les une des autres, la perte de ressources (les cotisations des actifs) ne peut être remplacée.

    Ainsi, la MSA  –caisse autonome des agriculteurs non salariés— a vu le nombre de ses actifs chuter avec les regroupements d’exploitations ce qui a créé une impasse budgétaire de plusieurs milliards d’euros qui perdurera jusqu’au décès des retraités actuels.

    De même, les mineurs qui avaient leur propre caisse ont vu leur métier disparaître il y avait quelques 350 000 agents concernés (futurs retraités et retraités) et plus personne pour cotiser.

    Heureusement, l’Etat pour lui venir à la rescousse dispose de deux sources qu’il estime inépuisables : l’impôt et la dette de la France.

     

    Cette absence de solidarité n’existe pas dans le régime général.

    Par exemple, quand la métallurgie a connu son déclin, bien qu’il n’y ait plus de métallos pour cotiser les retraités ont continué à toucher leurs pensions.

     

     

    Les régimes spécieux (*) 

     

    SNCF, EDF, RATP, les PTT, etc.

    Quand l’Etat les a créés, il s’agissait d’un service public et il fallait mettre le turbo. Alors l’Etat a pensé (et oui on pourrait rêver d’un Etat qui ne pense pas, mais en France l’Etat pense !) qu’il fallait créer les conditions du succès de ces entreprises d’Etat. Ainsi fut fait.

    Comme l’Etat dispose de deux sources qu’il estime inépuisables : l’impôt et la dette de la France il a concocté des établissements publics attractifs avec salaires, avantages sociaux et retraites plutôt enviables.

    On aurait pu limiter ces avantages au moins dans le temps mais ça l’Etat n’y avait pas pensé.

    Ainsi, il est normal que le conducteur de train d’aujourd’hui qui respire le charbon et subit la chaleur de la loco ait quelques avantages par rapport à nous et il normal que dans un esprit d’entreprise certains de ces avantages soient aussi accordés à tous les salariés de la SNCF.

    De même le conducteur de métro ou de tram à Paris souffre de conditions de travail difficiles – notamment le bruit infernal— ce qui lui vaut des avantages considérables par rapport à son homologue de Lyon ou de Bordeaux qui ne souffrent pas de ces nuisances.

    Etc. etc.

     

    Mais ces avantages qui ne sont pas limités dans le temps ont quand même évolués.

    Les salariés disposent d’un pouvoir de nuisance important associé à la notion de service public, ils peuvent donc se mettre en grève pour exiger des améliorations de leurs conditions de travail (allègement des tâches ou de la durée par exemple), de leur rémunération et des avantages sociaux divers dont ils bénéficient.

     

    Comme leur employeur n’est pas privé, s’il faut leur donner satisfaction pour garantir la paix sociale et la réélection du pouvoir en place, alors il est facile de leur céder. Heureusement, pour ce faire l’Etat dispose de deux sources qu’il estime inépuisables : l’impôt et la dette de la France.

     

    De ce fait il y a deux catégories de travailleurs en France : les uns et les autres !

     

    Les uns doivent travailler jusqu’à 62 ans mais les autres pas. Et si on est caissière à l’Opéra de Paris, travail bien plus pénible que caissière au supermarché on peut faire valoir son droit à une retraite bien méritée dès l’âge de 42 ans.

    C’est ce qu’on appelle se payer une danseuse dans le jargon des nantis. Mais ce n’est pas les nantis qui paient les 1000 employés de cet Opéra pas comique, c’est nous avec nos impôts.

    Par contre comme conduire le métro est moins éprouvant que vendre des billets à l’opéra, le conducteur doit attendre 52 ans pour enfin pouvoir souffler.

     

    Les uns font un travail pénible, comme les pilotes d’Air France, mais les autres, pilotes qui ne sont pas chez Air France, ont un boulot facile qui n’induit donc pas d’avantages particuliers dans le régime général de retraites auquel ils sont affiliés.

     

    Les uns ont des avantages sociaux que les autres jalousent. Par exemple, un agent EDF bénéficie outre la retraite et l’emploi garanti, de vacances quasi gratuites payées par le comité d’entreprise et de l'électricité quasiment gratuite y compris pour toutes ses résidences secondaires.

    Ces avantages sont liés au système de retraite car ils n'apparaissent pas sur le bulletin de salaire Ils sont donc net d'impôts et sans cotisation retraite !

    Les travailleurs employés par un des 10 autres fournisseurs d’électricité n’ont aucun de ces avantages, bien sûr.

     

    Etc. etc.

    Etc. etc.

    Etc. etc.

     

     

    Résumé & conclusion

     

    Le système est globalement déficitaire mais l’Etat réussit à le maintenir à flot avec ses ressources illimitées auxquelles il ajoute les montants qu’il ponctionne au régime général lorsque ce dernier parvient à être excédentaire. En effet, celui-ci doit alors contribuer au financement des régimes qui ne le sont pas (c’est une question de solidarité mais elle est ici à sens unique !).

     

    Pour l’avenir si rien n’est fait le système sera globalement en faillite et l’Etat ne pourra pas continuer à le soutenir avec la dette et l’impôt.

    En effet, l’impôt en France est déjà tellement élevé que l’augmenter pour maintenir les retraites sans affecter les autres dépenses de l’Etat ne parait pas jouable. On a déjà atteint la limite où toute augmentation nominale de l’impôt réduirait à la fois la consommation des ménages et la compétitivité des entreprises payant l’impôt en France. Ce double ciseau (baisse de la consommation et moindre compétitivité des entreprises) ferait chuter le montant de l’impôt collecté aggravant ainsi le problème au lieu de le résoudre.

     

    Les régimes de retraites doivent donc être réformés pour rester viables.

    Augmenter le taux de cotisation de l’employé et/ou de l’employeur n’est pas jouable car cela provoque les mêmes effets pervers que l’augmentation des impôts.

    En fait, il faudrait plus de cotisants et moins de retraités.

    Allonger la durée de cotisation serait une solution provisoire qui augmenterait le nombre des actifs cotisants et réduirait le nombre des retraités bénéficiaires. Mais cela parait difficile tant que des inégalités importantes existent entre les durées de cotisation des divers régimes.

    Pour avoir plus de cotisant il faudrait surtout créer des emplois.

    Avec une croissance durable de 2,2% ou plus on créerait les emplois nécessaires à ce financement et cela réduirait même un peu le nombre d’actifs partant en retraite dès l’âge légal. Mais pour créer cette croissance et les emplois correspondants en France il manque encore deux ingrédients indispensables :

    ·        Un environnement qui rend les entreprises aussi compétitives que leurs concurrentes étrangères (le gouvernement actuel y travaille mais la situation n’est pas encore assez favorable).

    ·        Un état d’esprit général qui permet à la France d’évoluer et de s’adapter avec des formations et des métiers utiles dans un monde qui change. Mais cette mutation n’est pas encore acceptée et quand, au pied du mur, nous l’accepterons enfin il sera certainement trop tard.

     

    L’impasse est réelle mais le gouvernement prend le taureau par les cornes …

    L’avenir n’est pas rose car la croissance n’est pas au rendez-vous (comme toujours le gouvernement annonce 2% pour l’an prochain et mon coiffeur dit que demain il rasera gratis).

    N’ayant pas d’autre solution, le gouvernement propose donc d’uniformiser les retraites au sein d’un régime unique qui rendra les uns solidaires des autres. Avec un régime unique mettant tous les régimes dans le même panier le gouvernement espère pouvoir gérer les évolutions futures sans factions dissidentes puisqu’il n’y aura plus d’avantages ni autres pré-carrés à défendre.

    Mais les manifestations nous montrent quels sont les régimes spécieux les plus avantagés, et lui rappellent que ce n’est pas gagné.

     

    Que pense madame Soleil ?

    Elle a déjà entendu des promesses de politiques qui voulaient réformer notre système de retraite et qui ne l’ont pas fait (cf. Juppé).

    Elle a compris que le rue est plus forte que les politiques parce que la rue sera toujours là et que les politiques eux ne peuvent rester que tant que la rue les supporte.

    Mais elle a aussi entendu Macron dire et répéter qu’il fera ce qu’il a dit et il a promis de réformer le système des retraites.

    Madame Soleil a bien compris qu’il ne peut pas reculer. S’il reculait il serait foutu et n’aurait plus qu’à traverser la rue …

    Mais madame Soleil sait qu’il ne gagnera pas la bataille de la rue et elle pense que Macron le sait lui aussi.

    Alors elle prédit qu’il va tenir sa promesse et elle dit qu’il va unifier les systèmes de retraite.

    Il n’y aura qu’un système de retraite mais il sera assez souple pour tenir compte des disparités entre les anciens systèmes.

    Et il sera peut être effectif dès 2050.

    On ne touchera pas aux retraites des gens nés avant 1962.

    Mais on aménagera celles des gens nés à partir de cette date pour que perdurent les avantages qu’ils avaient avant cette réforme. Il n’y aura plus de régimes spéciaux, juste des aménagements spécieux dans le système unique et général.

    Macron aura tenu ses promesses et pourra être réélu.

    Certes les mauvaises langues diront que cela va coûter plus cher pour ne rien changer mais c’est un principe acquis depuis la réforme territoriale (les nouvelles régions) sorties de la boite à outil de Hollande.

    Mais madame Soleil n’est pas mauvaise langue donc elle ne dira rien, elle ne prédit même pas quand

    le système de retraites à la française que le monde entier nous envie

    volera en éclats.

     

    Quant à moi je ne pense rien sur la question.

     

     

    (*)  Ne m’appelez pas pour corriger mon orthographe.

     

     


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  • Commentaires

    1
    COURTE
    Samedi 21 Septembre 2019 à 11:35

    Il est de mauvaises langues qui disent que l'état ne verse pas les cotisations retraite de ses fonctionnaires dans la caisse prévue. 

     

     

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